Back to top

Tracer sa route. Le désir de ralentissement en Ariège

Recherches en cours
Début: Mars 2022
Fin: Décembre 2024

Les espaces ruraux sont souvent désignés comme des espaces au sein desquels la mobilité pose problème, et le récent mouvement des Gilets jaunes nous a bien montré combien y est sensible la question de l’accès à diverses ressources : emplois, santé, éducation, culture... Cependant, les espaces ruraux accueillent de plus en plus des personnes aspirant à changer de mode de vie, et plus précisément à décélérer et vivre plus en proximité. Alors, à quoi ressemblent et comment se concrétisent ces modes de vie désirés en territoire rural ?

Acteurs de la recherche

 

Contact : Agathe Lefoulon


Avec la crise sanitaire mondiale de 2020, le désir de changement de cadre de vie (avoir plus d’espace, être plus proche de la nature) a pris de plus en plus d’ampleur. Nombreuses sont les recherches en sciences sociales qui essaient de contextualiser ces migrations d’installation dans les espaces ruraux : migrations d’aménités, d’entrepreneuriat ou de décélération. Cette dernière désignation semble éclairer un ensemble diversifié d’installations que William Berthomière, Céline Gaille et Christophe Imbert observent depuis 2017 en Ariège, où la recherche d’un type d’activité est moins prioritaire que celle d’un autre rapport au temps.

Objectif de la recherche

Pour les deux géographes et la photographe, il s’agit d’obtenir par ce projet de recherche une compréhension fine de ce que recouvrent ces notions de décélération et de ralentissement, ainsi que des transformations (démographiques, sociales, économiques) à réaliser pour répondre à ces aspirations : comment décélère-t-on ? Comment met-on en pratique un tel changement de mode de vie, de rythme de vie ? Ils s’appuieront pour cela sur des trajectoires de vie d’habitants du territoire du Couserans, en Ariège. Car s’il est facile de rattacher ces choix de vie à des idéologies ou des utopies, il est beaucoup plus difficile de rendre compte de leur mise en œuvre. Or c’est en suivant sur plusieurs années la réalisation de projets de vie que les chercheurs et la photographe comptent comprendre comment le rapport à la mobilité se redéfinit dans les territoires ruraux : persistance de la dépendance, innovation et création de nouveaux liens sociaux, mise en place de savoir-faire…

La dizaine d’enquêtés s’inscriront chacun dans un ou plusieurs des 4 modes de décélération repérés en amont par les chercheurs et la photographe :

  • Faire paysan (rythme de vie et sociabilité paysanne)
  • Faire maison (mise en œuvre concrète de projets de décélération)
  • Faire expression (projets artistiques, culturels)
  • Faire école (lieux de formation, sensibilisation)

Le suivi répété de ces projets de décélération renseignera sur les transformations en cours du rapport à la mobilité dans des espaces ruraux isolés. Ces rapports évoluent à la fois à travers une re-localisation de l’activité professionnelle et domestique (faire paysan et faire maison), des choix de mobilité réfléchis, voire des créations utopiques de nouveaux modes de transport (faire expression et faire école).

Le fil rouge de la recherche sera d’explorer les rapports à la mobilité entretenus pour la réalisation de ces projets. Quelle place pour la préoccupation écologique ? Quel rapport au temps se dégage des choix modaux ? Quelle place jouent les liens faibles (bons plans, auto-stop, covoiturage informel, etc.) ? Quels usages des outils numériques ? L’hypothèse principale est celle de bricolages complexes et d’hybridation des choix en lien avec des contraintes spatio-temporelles difficilement évitables (se déplacer en voiture à horaires réguliers pour un emploi salarié nécessaire pour le budget d’un ménage ou le financement d’un projet, par exemple).

Méthodologie

La méthodologie de cette recherche repose sur une assise ethnographique se traduisant par un suivi régulier d’enquêtés sur plusieurs années.

Des «cahiers de décélération» selon élaborés avec les enquêtés, dans lesquels, entre chaque passage, ceux-ci vont noter leurs activités, leurs déplacements, leurs visites et l’accueil de personnes extérieures. La forme sera libre et discutée en amont avec chaque enquêté en fonction de ce qui leur convient le mieux (récit narratif, dessins, collages, tableau de budgets-temps, etc.). Lors de chaque passage, un entretien sera réalisé. Les cahiers et les entretiens déboucheront sur des cartographies sensibles individuelles où seront consignés lieux de déplacement et d’activité et la localisation des ressources pour le déplacement. On interrogera plus spécifiquement le lien à la métropole toulousaine entretenu par les enquêtés (lien entre décélération et coupure avec un lien métropolitain).

A côté de cette dimension subjective, un recensement de l’offre de transport en Ariège et de son évolution depuis 20 ans sera réalisé avec des entretiens auprès d’acteurs publics des collectivités territoriales (Couserans et Arize-Lèze). A partir de ce recensement, une cartographie statistique de l’accessibilité aux transports sera réalisée ainsi qu’une cartographie des dynamiques entrepreneuriales et immobilières.

Toute cette documentation statistique permettra de bien contextualiser les choix de modes de vie des enquêtés, plus particulièrement l’inscription territoriale de leurs activités et de leurs choix modaux.

Les résultats de cette recherche sont attendus pour fin 2024, et prendront la forme d’un rapport de recherche, d’un corpus photographique et de 4 créations visuelles et sonores (« diaporamas »).

Mode de vie

Un mode de vie est une composition - dans le temps et l’espace - des activités et expériences quotidiennes qui donnent sens et forme à la vie d’une personne ou d’un groupe.

En savoir plus x

Déplacement

Le déplacement est un franchissement de l’espace par les personnes, les objets, les capitaux, les idées et autres informations. Soit il est orienté, et se déroule alors entre une origine et une ou plusieurs destinations, soit il s’apparente à une pérégrination sans véritable origine ou destination.

En savoir plus x